Un enfant en colère essaye de se « réparer »
|Dans son livre « Je t’en veux, je t’aime », Isabelle Filliozat évoque l’idée d’une colère qui aiderait les enfants à se « réparer ».
Elle n’est pas dirigée « contre » quelqu’un mais plutôt pour tenter de réparer une intégrité en danger en agissant de l’intérieur.
C’est par exemple le cas d’un enfant à qui on refuse l’achat d’un jouet qu’il désirait tant qu’il l’imaginait déjà faisant partie de lui. Ainsi, sa frustration transformée en colère vise surtout à recoller ce morceau de lui dont on le prive, comme un mécanisme d’auto-défense.
Dans ce cas, si le parent n’accepte pas cette colère, la moque, l’étouffe, l’enfant comprend qu’il n’a pas le droit de se réparer. Il en déduit que le problème vient de lui, qu’il n’est pas « gentil », qu’il n’est pas digne d’amour dans cette situation, qu’il « mérite » ce traitement.
Ceci a des conséquences sur son estime et son identité. Il forge une image de lui-même « défectueuse ».
A l’opposé, dans le cas du jouet, si le parent comble tous les désirs pour éviter les colères, la demande ne cessera d’augmenter et l’égo de l’enfant prendra des proportions importantes avec des risques de narcissisme exacerbé et une déconnexion vis à vis des véritables besoins, qui eux, nécessitent d’être satisfaits. L’entrainement à la frustration est donc essentiel dans le développement de l’enfant (voir cet article).
Le but est par conséquent de savoir écouter cette colère, de cerner son caractère réparateur et d’ainsi d’accepter la blessure que l’enfant tente de soigner.
Cette approche consiste à accompagner l’enfant dans son débordement émotionnel (pleurs, cris,…) en le prenant dans nos bras (c’est aussi une question de sécurité), en lui parlant doucement et en posant des mots sur ce qu’il ressent.
C’est cette empathie qui aidera l’enfant à développer son intelligence émotionnelle (son cortex préfrontal régule de mieux en mieux son amygdale, siège de la colère) et contribuera à son épanouissement.
Pour conclure, je dirai que j’aime cette idée de colère réparatrice car cela modifie l’affect de cette émotion du point de vue du parent et de l’enfant. On ne se sent plus « agressé » face à son expression. On se place plutôt comme un réceptacle bienveillant et aidant.
[A compléter avec la lecture de cet article pour modifier complètement les croyances sur les colères des enfants : Pourquoi votre enfant exprime-t-il plus ses émotions avec vous qu’avec quiconque]
Plusieurs difficultés sont néanmoins à considérer :
- en tant qu’adulte, me suis-je aussi donné le droit à cette colère réparatrice que je peux accepter, verbaliser et transformer en demande réparatrice ?
- je suis conscient de la contagion d’une émotion : voir la colère peut induire la colère en moi (surtout si je suis déjà fatigué et stressé). Je ne suis alors plus en état d’écouter la colère de mon enfant car mon cerveau est lui-même débordé. Pour éviter cela, faisons une pause et pensons à notre respiration quelques secondes. Retrouvons le calme. Car la contagion fonctionne aussi ainsi. On peut transmettre le calme.
Boite à outils :
Voici des outils relatifs à la colère.
L’ardoise de la colère (et de la joie)
La technique des petits points pour apaiser la colère (ou se libérer de toutes les grosses émotions)
Switch : Une astuce créative pour calmer la colère des enfants
Le livre en colère ! Pour aider les enfants à la surmonter (dès 2 ans)
La roue pour libérer la colère sans violence
Source :
« Je t’en veux, je t’aime » d’Isabelle Filliozat disponible sur decitre.fr , cultura.com et chez votre libraire.
Bonjour,
Il est vrai que la colère se propage et contamine j’ai une enfant de 7 ans très colérique car gestion de la fatigue difficile pour elle dû à son besoin de sommeil important et les câlins sont la solution nous avons du passé par les câlins serré pour la contenir et ne plus laisser la colère lui faire mal mais un soir comme ce soir mercredi ou j’ai beaucoup fait avec et pour eux je n’ai pas répondu correctement j’ai fui cette énième colère et demain je vais lui dire pardon.
La bienveillance c’est respirer accepté ses limites et pardonner… J’ai pris le bon recul depuis que je suis parent mode bienveillante grâce à votre page et d’autre… Merci beaucoup.
Excellent billet! J’apprécie imagée la colère de l’enfant. Ça me permettra d’être davantage bienveillante envers ma petite fille.
Merci pour cet article éclairant.
Je m’interroge toutefois sur les points suivants : comment réagir quand l’enfant exprime sa colère en tapant ses parents, en crachant ou en les insultant ? La fille de 3 ans fait cela en ce moment avec moi (sa mère), et après elle réclame les bras pour que je l’aide à se calmer. Est-ce que lui faire un câlin à ce moment ne revient pas à cautionner ces gestes violents envers moi et à l’inciter à recommencer ?
D’après ce que j’ai compris, l’important est de lui donner ce câlin pour qu’elle puisse se calmer. Une fois calmée elle sera en mesure d’entendre votre stop pour les coups. Et du coup vous pouvez la cadrer en lui disant que la prochaine fois qu’elle tapera vous vous éloignerai pour ne pas recevoir de coups, car c’est non ok, mais que vous serez toujours là pour la prendre dans les bras quand elle en aura besoin.