Pourquoi certaines personnes plaisantent sur la violence faite aux enfants ?
|Voici un commentaire que j’ai reçu ce jour sur Facebook. Ce n’est qu’un exemple de réactions qui surviennent quand nous abordons la bienveillance éducative. Pourquoi une personne derrière son écran (ou dans la vraie vie même si il y a plus de réserve et d’inhibition) en vient à poster ceci ?
La psychologie nous offre quelques pistes pour comprendre :
1. Mécanismes de défense psychologiques
Beaucoup de personnes ont été elles-mêmes exposées à des violences éducatives (coups, humiliations, cris…) pendant leur enfance. La « blague » ou le cynisme deviennent alors un moyen inconscient de désamorcer leur propre souffrance, de rendre le sujet plus supportable.
Exemple de mécanismes en jeu :
- Minimisation : « C’était pas si grave, regarde, j’en rigole aujourd’hui. »
- Humour noir / cynisme : Pour mettre à distance des souvenirs douloureux.
- Désensibilisation : Quand l’exposition répétée à des violences normalisées rend insensible.
2. Normes culturelles et transmission intergénérationnelle
Dans certaines cultures ou familles, la violence éducative a été longtemps vue comme « normale », voire valorisée comme « nécessaire pour bien éduquer ».
Le fait d’en plaisanter est parfois perçu comme une manière d’affirmer son appartenance à ce modèle éducatif traditionnel, voire de se rassurer sur ses propres pratiques.
Exemple :
La fameuse phrase :
« On s’en est pris des claques, et on n’en est pas morts, hein ? »
(souvent dite sur le ton de la blague… mais qui cache souvent une dissonance cognitive).
3. Dissonance cognitive
Lorsqu’un adulte réalise (même vaguement) que ce qu’il a subi ou fait subir n’est pas acceptable, il peut avoir deux choix :
- Remettre en question profondément son modèle éducatif (ce qui est douloureux, car cela réactive culpabilité et honte)
- Ou… rationaliser et tourner ça en dérision, pour continuer à vivre avec.
L’humour devient alors un refuge contre la culpabilité ou le doute moral.
4. Effet de groupe et pression sociale
Dans un environnement où « tout le monde rit » d’un sujet, ne pas rire revient à être le rabat-joie, celui qui casse l’ambiance.
Par conformisme, même des personnes choquées peuvent se retrouver à rire de ce qui, au fond, les dérange.
5. Méconnaissance (volontaire ou pas) des conséquences réelles
Beaucoup de gens ignorent encore les effets prouvés de la violence éducative sur le développement émotionnel, cognitif et relationnel des enfants.
Il peut aussi y avoir une volonté de ne pas connaître le lien entre violences éducatives et les troubles de l’attachement, les risques de dépression, les difficultés scolaires ou les comportements agressifs ultérieurs. Cet ignorance évite de ressentir de la culpabilité ou de la honte quand le sujet est abordé.
6. Humour déplacé par banalisation sociale
Les blagues sur les enfants qui « mériteraient une fessée » ou les « claques pédagogiques » sont aussi un reflet d’une culture où la violence éducative a été longtemps banalisée.
Exemple : Certaines émissions de télé ou sketchs humoristiques tournent encore ces sujets en dérision, contribuant à entretenir cette banalisation.
7. Loyauté envers ses parents
Remettre en question l’éducation reçue peut déclencher un conflit de loyauté chez la personne qui a par exemple subi des violences et des méthodes coercitives et est encore dans un schéma de soumission par rapport à ses propres parents. Éduquer autrement reviendrait à les trahir et peut-être perdre leur « amour ». C’est donc ces peurs qui sont le moteur de la reproduction des pratiques « éducatives » héritées.
Résumons (en langage simple et empathique) :
Quand les gens plaisantent sur la violence éducative, ce n’est pas parce que c’est drôle.
C’est souvent parce que :
- Ça leur permet de ne pas trop souffrir
- Ils répètent des normes éducatives héritées
- Ils sont mal à l’aise mais préfèrent en rire que d’y penser sérieusement
- Ils ne savent pas vraiment les dégâts que ça cause ou préfèrent les ignorer
- Ils ont l’impression de rendre hommage à leurs parents
- Ils sont contrôlés par leurs psychotraumas