Faut-il cacher nos soucis à nos enfants ?

Nous rentrons du travail stressés, des soucis se bousculent dans notre tête, à cela s’ajoutent les « corvées » à venir et le timing du coucher à respecter, les sollicitations bien légitimes de nos enfants qui avaient hâte de nous voir enfin après une longue journée loin de nous,…

La vie de parent est loin d’être simple mais nous nous efforçons souvent de faire « bonne figure » face à nos enfants en leur dissimulant nos ressentis.

Est-ce la solution idéale ? Il semblerait que non selon une récente étude relayée par le magazine Cerveau & Psycho de février 2019.

Des chercheurs ont réuni plus de 100 parents avec leurs enfants. Puis ils ont stressé les adultes en leur demandant de parler en public, public volontairement « difficile ».

Puis chaque duo parent/enfant jouait aux Lego de façon collaborative : les enfants lisaient les plans et le parent montait l’objet à fabriquer.

La moitié des parents ont eu la consigne suivante : cachez votre stress et vos émotions désagréables.

Dans ce cas, parents et enfants étaient moins réactifs et moins chaleureux envers l’autre lors du montage des Lego.

La raison évoquée par Sara Waters est que les enfants sont particulièrement doués pour détecter la moindre trace d’émotion.

« S’ils sentent qu’un évènement négatif s’est produit, il est déroutant pour eux de voir les parents se conduire normalement et faire semblant de rien« . Déroutant et donc stressant voire culpabilisant s’ils pensent que le problème vient d’eux. Ce qui peut les amener à se comporter anormalement : s’opposer, rire de nervosité, exprimer une colère « réparatrice » ou défensive, retarder l’heure de coucher avec des stratégies pour comprendre et améliorer l’ambiance,…

 

À cela s’ajoute le fait que si nous, parents, n’exprimons pas nos émotions ou notre stress calmement, nous n’offrons pas un modèle libérateur à nos enfants. En effet, les neurosciences ont prouvé que verbaliser une émotion désagréable lui ôtait de la puissance et permettait de mieux la traverser.

Ajoutons enfin que les émotions désagréables qui ne sont pas exprimées ont tendance à s’accumuler et à « exploser » soudain de manière démesurée.

La conclusion que nous apporterons à cette expérience est qu’il est inutile de cacher nos affects négatifs à nos enfants car ils les détectent. Nous pouvons les transformer en enseignements de vie lorsque nous évoquons les solutions et les actions que nous envisageons pour régler les problèmes.

En nous observant, les enfants appliqueront progressivement ces réflexes dans leur quotidien et n’auront pas de sentiment d’impuissance face aux aléas de l’existence et prendront conscience de leurs choix, y compris celui de demander de l’aide.

S’écouter soi-même et accueillir nos ressentis est aussi le chemin idéal pour faire preuve d’empathie pour autrui. C’est aussi la voie à privilégier pour apaiser le mental et se « connecter » à l’instant présent, là où évoluent nos enfants.

Attention à la parentification

Selon les conseils de la neuropsychologue Patricia Pereira, j’aimerais émettre une réserve concernant le risque de parentification (ou adultisme). Quand on évoque notamment des inquiétudes par rapport à certains problèmes familiaux (comme ceux liés à l’argent) en accentuant le sentiment d’impuissance de l’adulte. L’enfant en entendant ce type de discours peut en arriver à penser que c’est à lui de trouver une solution.

Au lieu de cela, il sera judicieux de prôner le partage d’informations et d’émotions sans jugement et surtout l’issue positive et les actions concrètes dont l’adulte prend clairement la responsabilité.

Voici deux exemples :

Exemple à éviter : « je ne sais pas comment on va manger ce mois. Je suis désespéré.e «
Exemple de partage : «  oui, je suis préoccupé.e à propos du travail, mais je cherche à trouver une solution ».

 

Merci à Patricia Pereira, neuropsychologue, pour la relecture de cette article et son précieux avis.

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