« ça t’apprendra » et « bien fait pour toi » : deux expressions à abandonner d’urgence
|J’ai deux scoops pour commencer ce petit article « coup-de-gueule ».
« ça t’apprendra » n’apprend rien en réalité.
« bien fait pour toi » ne fait absolument pas de bien à quiconque.
Ces expressions, suivies immanquablement (au mieux) de, « la prochaine fois tu m’écouteras », »je te l’avais dit » ou d’un rire moqueur et (au pire) d’une violence physique ou verbale, sont, je trouve, très énervantes (pour rester correct).
Enervantes car, avec un zeste d’empathie, nous n’aimerions pas recevoir la double peine de la déception d’un échec ET de l’humiliation du jugement public qui sous-entend que le pouvoir et l’expérience sont ailleurs, mais certainement pas entre les mains d’un enfant (en pleine tentative d’apprentissage pourtant).
Cette formulation laisse même des séquelles :
- baisse de l’estime de soi
- auto-dénigrement
- retard dans l’autonomie
- peur du jugement et du regard d’autrui
- prise d’initiative moindre
- propension à la maladresse
- risque d’agressivité (liée aux blessures d’ego)
- intelligence sociale dégradée
- …
Bref, on est loin d’un encouragement. Très loin.
L’adulte qui s’exprime ainsi va cependant goûter à la grisante sensation de dominer…mais franchement, est-ce si valorisant ? n’a-t-on pas plutôt envie de faire naître une saine motivation intrinsèque chez l’enfant et d’accélérer l’acquisition de comportements adaptés.
Les échecs sont déjà douloureux et frustrants. Autant ne pas en rajouter.
Surtout que sans eux, la progression est impossible.
Donc, devant un enfant qui commet (ou qui s’apprête à commettre) une faute, changeons de perspective :
- demandons-nous quel besoin il cherche à satisfaire
- interrogeons-nous sur ses chances de réussite en fonction de son expérience, des informations qu’on lui a données, de ses capacités à l’instant T.
- assurons-nous que les règles sont comprises, mémorisées et déjà appliquées quelques fois
- privilégions la formulation positive (« voilà ce que j’attends » »voici la règle ») à la formulation négative (« tu ne dois pas faire ça », « ceci est interdit »)
- alimentons la confiance et la persévérance en utilisant le mot « encore » : « tu n’as pas encore réussi, c’est pour bientôt. »
- faisons l’autopsie de l’échec (sans juger) avec lui pour que les meilleurs enseignements soient extraits et retenus
- adoptons le mantra « Mon rôle est de l’accompagner dans son apprentissage. »
- décrivons-lui de quelle manière il a surmonté un obstacle dans le passé : apprendre à marcher, à faire du vélo, etc
- offrons-lui des choix avant qu’il n’agisse afin de le guider sur la meilleure voie
- apprenons-lui à réparer (et montrons-lui comment s’excuser)
- partageons nos émotions (à la première personne et sans violence) et aidons-le à faire de même.
- soyons calmes et patients pour que notre stress ne bloque pas ses capacités d’apprentissage
- entrainons-le en lui déléguant des tâches dans la maison ou à l’extérieur et ne nous substituons pas à lui lorsqu’il sait faire.
- racontons-lui comment nous-même avons souvent échoué pour finalement réussir (en concentrant notre récit autour de nos actions, pas de notre personnalité).
- stoppons le déterminisme négatif (via)
– Du jugement limitant « Tu es maladroit, tu n’arrives jamais à rien, tu casses toujours tout ».
– Du retrait de confiance : « Laisse-moi faire. Je ne veux pas que ça finisse en catastrophe ».
– De la pression : « Je te regarde. Voyons comment tu te débrouilles ».
– La comparaison : « tu es aussi maladroit que moi/ta soeur/… » - mettons fin toute forme de menace
- jouons ! Rien de tel pour apprendre.
- réfléchissons avec le coeur (amour) plutôt qu’avec le mental (ego)
- posons-nous la question : qui imitons-nous lorsque nous disons « bien fait pour toi ! » « ça t’apprendra » « je te l’avais dit ! ». Qui s’est adressé ainsi à nous et comment nous l’avons perçu ? De qui nous vengeons-nous vraiment ?
Merci d’avoir pris le temps de me lire.